Nous nous trouvons souvent déstabilisés face à la souffrance ou à la contrariété que nous subissons. Devant l’injustice, le mal et la souffrance, la Bible invite l’homme à regarder la vérité en face, contrairement au bouddhisme.
Dans le précédent article, nous avons montré que le constat bouddhiste selon lequel tout est illusion vient nier ce que l’expérience nous enseigne, à savoir :
- la souffrance est vraiment ressentie par des personnes,
- l’homme est une personne, comme le montre sa conscience et son cri devant l’injustice.
La Bible, présente l’homme comme un être personnel et relationnel créé à l’image d’un Dieu aimant et juste, en vue d’aimer et d’espérer. Mais on ne peut aimer sans souffrir.
Qu’affirme le bouddhisme sur la souffrance ? Que dit-il de la compassion ? Comment la compassion bouddhiste s’accommode-t-elle à merveille avec l’individualisme ambiant ? En quoi détourne-t-elle l’homme d’une attitude saine face à la mort, à la souffrance, et à l’amour ? L’amour chrétien et la compassion bouddhiste sont-ils un seul et même chemin vers un même but ? Dans cet article, je vais démontrer le contraire.
La compassion bouddhiste ne conduit pas à l’amour chrétien
Toute la philosophie bouddhiste s’articule autour du constat de la réalité de la souffrance et sur la résolution de celle-ci. Elle doit permettre à l’homme de l’éviter, voire de la dépasser : la souffrance est, pour le bouddhiste, le mal ultime. Pourtant, les bouddhistes parlent beaucoup de compassion ! Étymologiquement, compatir, c’est « con-pâtir », « souffrir avec ». Pourtant, la compassion du bouddhiste ne peut pas signifier « souffrir avec » : ce serait illogique et incohérent par rapport à son objectif de dépasser et dissoudre la souffrance humaine.
Mais alors, comment les bouddhistes définissent-ils donc la compassion ? Il s’agit, pour eux, d’amener un individu à être libéré de la souffrance par le raisonnement, par un travail sur le mental, ou au travers d’exercices de méditation, et par un mode de vie qui évite les passions, le désir, la colère, les émotions et les pensées négatives ; un mode de vie qui se détache du monde matériel et des personnes.
Il s’agit d’aimer moins les gens et les choses de ce monde, pour souffrir moins. La compassion bouddhique ne conduit donc pas à aimer plus, mais à aimer moins. Elle ne conduit donc non pas vers l’amour chrétien ; c’est même le contraire qui se passe ! J’en veux pour preuve le témoignage d’Isabelle, une femme qui s’est tournée vers Dieu dans la communauté que je fréquente, et qui, le jour où elle a décidé d’aimer, de s’attacher à un mari et d’avoir un enfant, a naturellement rejeté le bouddhisme, qu’elle a alors jugé morbide ! Ainsi, pour le bouddhiste, la compassion ne peut pas signifier souffrir avec !
L’amour chrétien n’évite pas la souffrance, il l’accepte
Pourtant, et c’est là ce que nous enseigne la vie, l’amour qui se donne, souffre !
L’amour s’accompagne toujours d’un sacrifice, et donc, d’une souffrance.
Par exemple, pour s’unir à son conjoint, l’homme ou la femme ne peut plus vivre comme avant, avec ses habitudes de célibataire. Il doit renoncer à son égoïsme, et faire des concessions par amour. Et même si le couple apporte beaucoup de joies, cela génère aussi une certaine souffrance, souffrance liée au fait qu’un autre a maintenant droit de regard sur ma vie, et que mes imperfections se trouvent démasquées par celui qui partage mon intimité !
De la même manière, pour donner vie à une descendance, l’homme et la femme doivent renoncer à leur confort personnel, et sacrifier un peu de leur intimité pour faire place à la vie qui naît. D’abord, il y a les douleurs de l’enfantement, puis la fatigue des nuits blanches. La parentalité s’accompagne de beaucoup de joies, qui sont inaccessibles sans la souffrance.
Jésus a prouvé son amour par ses souffrances
Les images que nous avons utilisé pour parler de l’amour qui se donne et souffre sont issues de la Bible. La Bible emploie la même analogie pour expliquer l’œuvre transformatrice de Dieu dans le cœur de celui qui choisit de croire[1. Voir notre article : Pourquoi Jésus est-il mort ? Une identité transformée.] : Jésus, au chapitre 3 de l’évangile de Jean, parle de nouvelle naissance, de régénération, de naître à une vie nouvelle. Or, pour renaître à une vie nouvelle, il faut mourir ! C’est ce que nous observons dans la nature, où la vie végétale renaît après la mort de l’hiver. De la même manière, la vie nouvelle que Jésus est venue offrir, n’est rendue possible qu’au travers d’une mort, accompagnée de souffrances : la sienne, à la croix.
C’est par les souffrances, à la Croix, de Dieu fait homme que l’homme peut, en s’identifiant à Jésus dans sa mort, recevoir l’Esprit de Dieu, l’Esprit d’adoption. La personne qui vit cette identification change de paradigme : d’une vie égoïste et indépendante de Dieu, elle passe à une vie nouvelle, vécue dans la dépendance de Dieu.
Ainsi, Jésus a dû connaître des souffrances comparables aux douleurs de l’enfantement, pour que nous puissions devenir ses enfants, être adoptés, être enfantés en lui à une vie nouvelle, « naître de nouveau »[1.Jean 3.3-8], et être sa descendance[1. Esaïe 53.10 :« Mais le Seigneur donne raison à son serviteur écrasé. Et il a rétabli celui qui avait offert sa vie à la place des autres. Son serviteur aura des enfants et il vivra encore longtemps. Par lui, le Seigneur réalisera son projet. »].
De Jésus, qui a souffert pour donner la vie, le prophète Esaïe dit qu’il était celui que « tout le monde méprisait et évitait. C’était un homme qui souffrait, habitué à la douleur. Il était comme quelqu’un que personne ne veut regarder. Nous le méprisions, nous le comptions pour rien », il était « celui devant qui on se voile la face »[1. Esaïe 53.3.]. Selon une autre traduction, « il était celui qu’on dédaigne, celui qu’on ignore, la victime, le souffre-douleur. Nous l’avons dédaigné, nous l’avons compté pour rien, comme quelqu’un qu’on n’ose pas regarder ».
Face à la souffrance, le bouddhiste détourne le regard. Et bien plus encore, face à « l’homme de douleur et habitué à la souffrance », le bouddhiste détourne le regard… et se voile la face. C’est pour cela même que le bouddhiste ne peut pas avoir la même conception de la compassion qu’un chrétien : ce dernier croit que pour donner la vie, et sauver l’homme, Dieu a dû souffrir. Le chrétien croit en un Dieu qui s’est incarné, en Jésus, pour être Emmanuel, « Dieu avec nous » dans nos souffrances ; en un sauveur « élevé à la perfection par la souffrance »[1. Hébreux 2.10.], Jésus, qui est « l’homme de douleur, habitué à la souffrance », qui a « porté nos souffrances » et « s’est chargé de nos douleurs », et par les « meurtrissures » duquel « nous sommes guéris », et dont il est dit : « Il a plu à l’Éternel de le briser par la souffrance »[1. Ésaïe 53. 3,4,5, et 10].
Invitation à recevoir l’amour de Jésus pour être consolé et consoler les autres
Le Dieu personnel du christianisme s’est donné par amour pour les hommes, il s’est donné pour toi qui me lis, et il a été soumis à la faiblesse[1. Hébreux 4.15, Hébreux 5.2]. Il a subi notre souffrance, il a connu tous ces minuits de l’âme, tous ces instants d’angoisse, où notre âme était à l’agonie, comme perdue. Par amour pour nous, il a pris sur lui notre mort, ainsi que nos douleurs, tourments et châtiments.
Je me permets donc de te lancer une invitation, à toi qui me lis. C’est une invitation à connaître celui qui t’a tant aimé et à le découvrir au cœur des évangiles. Une invitation à suivre la voie de la compassion telle qu’enseignée par Jésus :
La voie ouverte par Jésus est celle d’une compassion qui s’engage. Une compassion qui ne détourne pas ses regards face à la souffrance de l’autre, mais qui accepte de souffrir avec lui, qui « pleure avec ceux qui pleurent »[1. Romains 12.15]. Une compassion qui aime l’autre dans sa souffrance et prend ses larmes au sérieux. Car il est dit de Dieu qu’il « nous console dans toutes nos douleurs, afin que, par la consolation que nous recevons nous-mêmes de la part de Dieu, nous puissions consoler ceux qui se trouvent dans toutes sortes de douleurs ! »
Conclusion
Les différences énormes qui existent entre le bouddhisme et le christianisme nous les montrent comme deux systèmes de pensée opposés, totalement incompatibles. Cela implique un choix entre soit le repli, souvent morbide, dans lequel le bouddhisme, soucieux d’éviter la souffrance et de concourir au bien-être universel, se plonge ; soit l’engagement et l’amour, peu importe les souffrances traversées, parce que le chemin du bonheur et de l’amour véritable passe par la souffrance : « L’amour, qui se donne, souffre ! ».
Le bonheur du chrétien n’est pas l’absence de souffrance. Le bonheur chrétien n’est pas le bien-être universel. Il n’est pas non plus le bien-être personnel ! Mais le bonheur du chrétien est la récompense offerte à celui qui place sa confiance en Dieu et choisit la voie de l’amour pour Dieu et le prochain.
Le bonheur du chrétien se trouve donc sur le chemin de la relation à l’autre, qui est aussi une école de souffrance qui nous confronte à nos limites. Le bonheur du chrétien se trouve sur le chemin de la relation à un Dieu personnel, et non pas sur le chemin où l’âme de la personne fusionne avec le Grand Tout, ou encore se dissout dans le Grand Rien !
Le bonheur du chrétien se trouve, enfin, sur le chemin de celui qui refuse le déni de réalité, mais qui, responsable devant Dieu de ses actions, se décide à entendre la voix de Dieu, qui, longtemps après Abraham, nous dit, à nous aussi : « Marche devant ma face et sois intègre ! » [1. Genèse 17.1].
Aurélien Bloch
Juillet 2017
Voir les autres articles de la série :
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Bonjour !
Excellent article, particulièrement pertinent, surtout face au constat de l’omniprésence (de façon diffuse) de la religion bouddhiste dans nos espaces publics. Il suffit d’examiner les rayons (et leur emplacement) des librairies, jusqu’aux albums à colorier.
Effectivement, en complément de votre analyse, l’on peut dire que l’objectif du bouddhisme (dont le tour de force est de prétendre ne pas être une religion alors que ça en est bien une !) est la non-existence, alors que Jésus est venu pour nous faire passer de la mort à la vie et nous donner “la vie en abondance”(Jean 10v10).
Bien à vous et bien fraternellement,
Pep’s