Nous sommes tous à la recherche de notre identité. Nous avons besoin de savoir qui nous sommes. Nous avons besoin de sentir que nous valons quelque chose, et nous nous demandons ce qui peut nous donner cette valeur.
L’identité par la société
Dans un passé lointain, l’identité était donnée par la société et la tradition. On était défini par la famille à laquelle on appartenait, le village où l’on était né, la personne que l’on avait épousée. Dans beaucoup de cas, le métier et la situation de vie de quelqu’un était défini par sa naissance. Le fils du forgeron serait forgeron ; le fils aîné d’une famille noble hériterait du domaine, le second serait évêque et le troisième chercherait la gloire par les armes. Ces définitions pouvaient être emprisonnantes, mais elles donnaient aussi une stabilité et une sécurité ; chacun était un membre valable de la société s’il restait à sa place et respectait les devoirs associés aux relations qui le définissaient.
L’identité en nous même
Aujourd’hui, cela a changé du tout au tout. L’identité ne se trouve plus dans les structures sociales, mais dans l’individu. Chacun est appelé à se définir lui-même, à choisir son identité. Il faut trouver sa voie, s’inventer soi-même. Le grand péché aujourd’hui serait le conformisme, le fait de se laisser définir par la société. Paradoxalement, c’est la société qui nous le dit ! Combien de films et de séries nous montrent un individu habité de désirs et de souhaits que son entourage désapprouve, et nous montrent comment le héros outrepasse les attentes pour se réaliser lui-même et accomplir son rêve ? Mais le message pernicieux est que l’on doit avoir un rêve, une spécificité originale pour être quelqu’un d’intéressant. On doit trouver ou choisir qui nous sommes, et vivre à la hauteur de ce choix. On doit «se réaliser», «se dépasser» pour ne pas faire partie de la foule anonyme et inintéressante. Cela mène à ce qu’un livre appelle «la fatigue d’être soi[1. La Fatigue d’être soi. Dépression et société, Alain Ehrenberg, Odile Jacob, 1998. J’ai consulté cette fiche de lecture en ligne.]» : l’épuisement de toujours devoir trouver en soi-même la motivation et l’énergie pour prendre des initiatives et pour atteindre des buts. Buts que l’on doit aussi trouver en soi-même. Mais que faire si l’on n’y arrive pas ? Et comment trouver en nous-mêmes notre identité ? La société nous dit d’écouter notre cœur, autrement dit nos émotions. Mais celles-ci changent et fluctuent, et ne nous conduisent pas nécessairement à nous réaliser.
Chercher en nous-mêmes la définition de notre identité, c’est comme essayer de se soulever du sol en s’attrapant par les bretelles. Nous avons besoin que notre identité soit donnée et reconnue par quelqu’un d’autre. Mais les sociétés humaines ne peuvent pas vraiment le faire ; soit elles nous renvoient à nous-mêmes, soit elles nous enferment dans une norme qui dicte ce que nous sommes censés être, sans réellement nous connaître.
Mais alors, qui peut nous dire qui nous sommes ? Qui nous connaît vraiment ? Qui est au-delà des modes de pensées et des préjugés de nos sociétés ? Qui a l’autorité de nous définir ? Qui peut nous donner de la valeur sans nous écraser sous les attentes ? Qui a l’amour pour nous nommer sans nous enfermer ? Qui peut fonder notre identité ?
L’identité en Dieu
La réponse est à la fois logique, presque évidente, et audacieuse, presque inadmissible : Dieu.
Dieu est notre créateur, celui qui nous a fait. Lui seul connaît chaque évènement de notre vie et chaque désir de notre cœur. Lui se situe au-delà des modes et des mouvements de foule. Lui seul sait non-seulement ce que nous sommes, mais aussi ce que nous sommes destinés à être.
Quelle évaluation ?
En regardant à Dieu, il y a une mauvaise et une bonne nouvelle. La mauvaise nouvelle, c’est qu’en soi, notre identité aux yeux de Dieu n’est pas belle à voir. Dieu connaît tout, et il voit tout ce qui habite nos cœurs et que nous ne voudrions jamais voir révélé. Il connaît nos haines, nos jalousies, notre mépris, notre convoitise, nos mensonges et nos fuites. Dieu nous a donné de la valeur en nous créant, mais l’humanité a tout gâché en faisant les choses à sa tête, devenant tordue et mesquine.
Une identité nouvelle
Mais la bonne nouvelle, c’est que Dieu ne veut pas nous laisser dans cette identité tordue. Dieu veut donner aux hommes une nouvelle identité. Il l’a fait en devenant un homme : Jésus. Un homme comme nous par nature, mais sans l’aspect tordu ; un être humain tel que l’homme devait être. Jésus est venu subir le sort que mérite notre identité tordue : une mort ignoble, sous les crachats et le mépris. Il l’a fait pour nous donner son identité : Fils de Dieu, bon, aimé, acceptable aux yeux de Dieu[1. «Voyez à quel point le Père nous a aimés ! Son amour est tel que nous sommes appelés enfants de Dieu, et c’est ce que nous sommes réellement» (la Bible, première épître de Jean, chapitre 3, verset 1).
«Dès que quelqu’un est uni au Christ, il est un être nouveau : ce qui est ancien a disparu, ce qui est nouveau est là.» (Deuxième épître de Paul aux Corinthiens). ]. Cette identité que Dieu donne n’est pas basée sur nos réussites et notre succès[1. C’est pourquoi elle ne doit conduire personne à prendre de haut les autres.], elle est basée sur l’amour de Dieu et sur ce qu’il a déjà fait en Jésus-Christ. Cela nous donne une grande valeur : j’ai tant de valeur aux yeux de Dieu qu’il a jugé bon de venir donner sa vie pour moi. Cette identité-là ne dépend pas de notre capacité à nous conformer à une feuille de route préétablie, ni de notre capacité à nous inventer une identité. Cela nous est donné, gratuitement, dans l’amour. Cette identité ne dépend pas non plus de l’ethnicité, de l’appartenance à tel ou tel peuple, du statut social ou encore du genre. Dans la Bible, l’apôtre Paul dit au sujet de ceux qui reçoivent cette nouvelle identité en Christ :
Car vous êtes tous enfants de Dieu par la foi qui vous lie à Jésus-Christ. Vous tous, en effet, avez été unis au Christ dans le baptême et vous vous êtes ainsi revêtus de tout ce qu’il nous offre. Il n’importe donc plus que l’on soit juif ou non juif, esclave ou libre, homme ou femme ; en effet, vous êtes tous un dans la communion avec Jésus-Christ[1. Lettre de Paul aux Galates, chapitre 3, versets 26 à 28. Paul l’écrit similairement ailleurs : «Il n’importe donc plus que l’on soit non-Juif ou Juif, circoncis ou incirconcis, non civilisé, primitif, esclave ou homme libre ; ce qui compte, c’est le Christ qui est tout et en tous.» Lettre de Paul aux Colossiens, chapitre 3, verset 11.].
La nouvelle identité que Dieu propose n’est pas un enfermement dans des objectifs qu’il nous faudrait atteindre pour être acceptable. Mais il ne s’agit pas non plus d’un chaos indéfini où l’on n’aurait ni substance, ni but. L’identité que Dieu donne à ceux qui croient en Jésus-Christ comporte des objectifs : aimer Dieu et son prochain ; parler et agir en accord avec la vérité ; servir à la gloire de Dieu, etc. Mais ces objectifs sont des manières d’exprimer l’identité que Dieu donne. Ils ne sont pas des conditions pour obtenir cette identité. Dieu accepte de faire de nous ses enfants avant que nous ayons fait quoi que ce soit de bien. Ensuite, il nous permet de vivre comme ses enfants, dans une vie qui est satisfaisante et bienfaisante[1. Pour la question du comportement induit par la nouvelle identité en Dieu, voir Pourquoi Jésus est-il mort ? Une identité transformée.].
Jean-René Moret[1. Je me suis inspiré très librement de la conférence de Tim Keller : “Our Identity: The Christian Alternative to Late Modernity’s Story“, (11/11/2015).], Mai 2017